Dans le fret intérieur, les transports routiers sont en train de supplanter les transports ferroviaires plus respectueux de l’environnement. En allumant son Feu dans les Alpes le 14 août 2021 sur le Niederbauen, l’Initiative des Alpes dénonce les distorsions de concurrence nuisibles à l’environnement dans le transport de marchandises. Elle revendique ainsi des objectifs de transfert dans le trafic de marchandises intérieur à l’instar de ceux qui sont définis pour le trafic de transit. Pour le transport intérieur, la Suisse a aussi besoin d’une part minimale définie de transport par le rail.
Une fois de plus, l’Initiative des Alpes appelle à l’urgence de la protection des régions alpines avec son Feu des Alpes. Cette année, la manifestation aura lieu samedi soir sur le sommet emblématique du Niederbauen au-dessus d’Emmetten (NW). Surplombant le lac des Quatre-Cantons, le feu sera visible loin à la ronde. Il aura pour but de sensibiliser la population aux dommages environnementaux causés par une politique fédérale et parlementaire qui porte préjudice au chemin de fer et favorise le transport par camion.
Un politique de transfert suisse contradictoire
Bien que la Confédération, le Parlement et l’électorat se soient engagés à transférer le transport de marchandises vers le rail, la part du transport intérieur, d’importation et d’exportation ferroviaire est passée à seulement 22 % en 2018 alors qu’elle s’élevait encore à 29 % en l’an 2000. De son côté, la part de la route a augmenté de 71 % (2000) à 78 % (2018), toujours pour le transport intérieur, d’importation et d’exportation. Il n’y a que dans le transport de transit que la part du fret ferroviaire augmente.
Conclusion : la réduction de l’offre dans le transport ferroviaire de marchandises à l’intérieur de la Suisse annule les succès obtenus dans le transfert du trafic de transit transalpin. Les coûts environnementaux externes générés par les camions (émissions de CO2, poussières fines, bouchons, bruit ou accidents) s’élèvent à 9,7 centimes par tonne-kilomètre alors que ceux du rail n’atteignent que 4,5 centimes. La contribution de la RPLP de 3,2 centimes par tonne-kilomètre ne compense du coup que partiellement les dommages environnementaux causés. D’après les calculs de l’Office fédéral du développement du territoire ARE, la branche des transporteurs fait peser à la collectivité des coûts non couverts de 1,4 milliards par année.
Concurrence faussée et déloyale
La suppression précipitée en 2016 de l’aide financière au fret ferroviaire intérieur (dont CFF Cargo est le principal prestataire) contribue au retour à la route, nuisible à l’environnement et au climat. En conséquence, CFF Cargo a été contrainte à réduire son infrastructure de transfert ferroviaire sur les tronçons non rentables dans les derniers kilomètres de distribution. Des 500 points de desserte en l’an 2000, il n’en reste plus que 285 actuellement et le nombre d’employés a diminué de moitié. Malgré des mesures rigoureuses de réduction des coûts, la perte de CFF Cargo s’élevait en 2020 à 34 millions de francs. De nouvelles mesures visant à diminuer les frais, et donc les points de dessertes, sont prévisibles et leurs conséquences sont déplorables pour Jon Pult, président de l’Initiative des Alpes : « Chaque réduction de l’offre ferroviaire pousse un peu plus le trafic de marchandises sur la route, moyen de transport plus polluant. Il est donc urgent que CFF Cargo, ainsi que les autres concurrents dans le transport ferroviaire, puissent jouir de conditions égales et plus favorables. »
La politique n’a pas réussi à créer des conditions de concurrence équitables pour le fret ferroviaire mais cette inégalité peut être compensée par une forte hausse de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP).
Le Feu dans les Alpes 2021 sur le Niederbauen lancera un signal contre les mesures contradictoires et hésitantes de la politique de transfert de la Confédération. Il s’agit d’ouvrir des perspectives économiques au fret ferroviaire à l’échelle nationale car les conditions faussées ont fait échouer la libre concurrence.
Vous trouverez des photos du Feu dans les Alpes dimanche 15 août dès 12 heures sous www.alpeninitiative.ch/medien.
5 orientations pour une part minimale du transport ferroviaire et une concurrence équitable
Nous avons besoin…
- d’une part minimale définie au rail dans les transports intérieur, d’importation et d’exportation. L’objectif de transfert de la route au rail doit être ambitieux surtout en ce qui concerne le trafic d’importation et d’exportation sur de plus longues distances.
- d’un système de soutien financier qui compense le désavantage concurrentiel du transport ferroviaire de marchandises dans le pays. Cette compensation doit être maintenue jusqu’à ce que le trafic routier de marchandises couvre enfin entièrement ses coûts externes environnementaux et d’infrastructure.
- d’une infrastructure ferroviaire performante et donc concurrentielle pour les derniers kilomètres de distribution des marchandises. Celle-ci comprend suffisamment de points de desserte et de voie d’accès pour la distribution finale dans tout le pays. La construction d’infrastructures telles que terminaux, voies et installations ferroviaires pour le trafic de marchandises sont à prioriser.
- des conditions strictes pour le transport de marchandises se prêtant au transport ferroviaire. Des marchandises telles que le gravier, les minerais, les déchets, les matières premières ou le bois rond ne doivent être transportés que par rail dès une certaine distance et une certaine quantité.
- des exigences en matière d’infrastructures ferroviaires pour les nouveaux centres logistiques et les zones commerciales. À partir d’une certaine taille et d’un certain volume de trafic de marchandises, ils devront proposer un accès ferroviaire.