20. février 2007

Le flux de camions de déchets allemands vers la centrale d’incinération de Genève a représenté en 2006 une prestation de transport pour le moins massive: 14 millions de tonnes-kilomètres. La centrale de Lausanne suit de près avec 12 millions de tonnes-kilomètres. L’Initiative des Alpes demande une autre politique des déchets.

gd. En novembre 2005, l’Initiative des Alpes avait décerné le Prix des transports absurdes à l’usine d’incinération de Trimmis dans les Grisons, pour l’importation de 10’000 tonnes de déchets allemands sur des distances allant de 200 à 300 km. Malheureusement, en 2006, près de deux fois plus de déchets étrangers qu’en 2005 ont été incinérés en Suisse, principalement en provenance d’Allemagne. De nombreuses centrales d’incinération helvétiques sont concernées.

400’000 tonnes de déchets importés
En Suisse, la capacité des usines d’incinération des déchets ménagers (UIOM) dépasse 3,5 millions de tonnes par an. Notre pays produit annuellement environ 3,1 millions de tonnes de déchets urbains. Depuis l’an 2000, il est interdit de mettre en décharge des déchets combustibles en Suisse. En Allemagne, cette interdiction est en vigueur depuis le 1er juin 2005. L’obligation d’incinération entrera progressivement en force chez nos autres voisins.
Jusqu’en 2009, l’Allemagne n’aura pas la capacité suffisante pour incinérer tous ses déchets urbains. Pour faire tourner leurs installations à plein régime, la majorité des centrales d’incinération suisses se sont déclarées preneuses de déchets allemands. Résultat: quelque 400’000 tonnes de déchets importés en 2006, en grande partie depuis l’Allemagne. Cette situation est la conséquence d’une planification déficiente, tant en Suisse qu’en Allemagne. Elle pourrait perdurer avec des importations de déchets italiens, français, et éventuellement autrichiens.

La route accapare 85% des importations
Même si l’incinération des déchets est écologiquement supérieure à leur mise en décharge, la nécessité de transporter des déchets à des centaines de kilomètres de leur lieu de production reste regrettable. Elle l’est d’autant plus si les transports se font par camions, générant ainsi une pollution de l’air importante. Or, c’est précisément ce qui se passe: 85% des déchets importés en Suisse se font par la route, 15% par le rail.
De fait, seules deux usines d’incinération importent leurs déchets allemands par le rail: Weinfelden en Thurgovie et Monthey en Valais (qui importe cependant 3’000 tonnes de déchets italiens par camions). Toutes les autres usines ont privilégié la route.

Genève et Lausanne, mauvais élèves
L’usine des Cheneviers à Genève remporte la palme. En 2006, elle a importé 20’000 tonnes de déchets depuis Munich par la route. Cela représente 14 millions de tonnes-kilomètres. En 2007, les déchets allemands passeront à 30’000 tonnes. L’intention est d’en importer environ 5000 tonnes par le rail, et 25’000 par la route.
L’usine des Cheneviers est la plus grosse centrale d’incinération de Suisse, avec une capacité de 350’000 tonnes. Les besoins genevois représentent environ 240’000 tonnes. Il est effectivement prévu de fermer un des trois fours d’incinération, lorsqu’il sera amorti, et de ramener la capacité aux besoins locaux… en 2015. D’ici là, l’usine des Cheneviers va continuer à chercher les 100’000 tonnes manquantes à l’étranger ou dans d’autres cantons.
A l’heure actuelle, environ 28’000 tonnes de déchets vaudois (de la région de Nyon) sont incinérés à Genève. Dès 2010 ou 2011, ils seront incinérés à l’usine Tridel de Lausanne. En attendant, Lausanne importe par camions 30’000 tonnes de déchets … allemands. Cet été cependant, le tunnel ferroviaire de Sébeillon, construit spécifiquement pour amener par wagons les déchets à l’usine de Tridel, devrait être mis en service. Cela permettra à au moins 70% des déchets vaudois d’arriver par le rail, qu’ils proviennent des communes vaudoises… ou d’ailleurs.

Une nouvelle politique des déchets
L’Initiative des Alpes demande que notre politique des déchets soit améliorée, tant pour les déchets urbains que pour les déchets industriels. La planification et la coordination doivent être renforcées pour éviter les excès de capacité. Le rail doit avoir la priorité sur la route. De plus, il serait souhaitable de cesser d’exporter près de 300’000 tonnes de bois usagé (et contaminé par des polluants). Il est en effet absurde d’exporter des déchets combustibles… pour en importer d’autres.